Journal des événements du 18 avril au 19 juillet 2018

 - Feux de forêt -

- Début avril 2018, manifestations à Managua, la capitale du pays, pour protester contre la réponse, considérée comme insuffisante, du gouvernement aux feux de forêt qui ont brûlé 5.500 hectares de la Réserve biologique Indio Maiz. Cette réserve naturelle tropicale est le foyer des peuples indigènes Rama et Kriol. Cette réserve a pour fonction de sauvegarder la biodiversité et les espèces en voie de disparition. La rumeur  et les manifestants veulent dénoncer les supposés intérêts du gouvernement dans cet incendie. (Destruction de la plus grande réserve naturelle qui peut retarder la construction du canal nicaraguayen). Il y a aussi des contre-manifestations pour soutenir le gouvernement et le Front Sandiniste. Cette campagne est largement relayée par les réseaux sociaux.

La vice-présidente,  Rosario Murillo, attaque les réseaux sociaux et tentent de les juguler.  - Réforme des retraites contestée -

  Le mercredi 18 avril 2018,  sur recommandation du Fonds monétaire international (FMI) et afin de rester le bon élève du FMI en Amérique latine, Daniel Ortega soutient un projet de réforme des retraites présenté par le gouvernement. Cette réforme de retraites  augmente les cotisations et abaisse les pensions de 5%. Des étudiants se mobilisent sur les réseaux sociaux et déclenchent des manifestations dans plusieurs villes. Ces manifestations sont durement réprimées. 

- Le dimanche 22 avril 2018, Daniel Ortega renonce à la réforme, alors que la vague de protestations continue. 

 

- Manifestations pour le départ de Daniel Ortega - 

Le lundi 23 avril 2018, des dizaines de milliers de personnes, salariés, étudiants, paysans et entrepreneurs, manifestent à Managua pour ... dénoncer la répression. 

Le retrait de la réforme n'a donc pas calmé la colère, et le déchaînement médiatique, de part et d'autre, redouble à l'intérieur comme à l'extérieur du Nicaragua. L'ONU demande au Nicaragua des "enquêtes rapides, indépendantes et transparentes" sur les victimes des manifestations.

Apparition de groupes voulant déstabiliser le pays n'ayant aucun rapport avec les revendications sociales. Ces groupes donnent naissance et entretiennent des émeutes et des barricades qui provoquent des ravages, des incendies, des pillages.

 Apparition de groupes pro-gouvernementaux qui les affrontent. Ces affrontements et ces pillages, font 25 morts en cinq jours.Le samedi 12 mai 2018, alors que la mobilisation s'intensifie, l'armée affirme "qu'elle ne réprimera pas" les manifestants. Y avait-il un désaccord entre le Président et son armée ? Ou bien étais-ce une "manoeuvre" du Président ?

Le mercredi 16 mai 2018, Daniel Ortega compte sur l'Église catholique pour l'aider à apaiser la situation. Il considère l'Église catholique comme son partenaire et alliée pour la réussite du seul exemple mondial de République socialiste chrétienne. Il fait appel à Monseigneur Léopoldo Brenes, archevêque de Managua et président de la conférence épiscopale du Nicaragua, et lui demande de jouer un rôle de médiateur. Un dialogue tendu s'ouvre entre Daniel Ortega et l'opposition, mais Léopoldo Brenes prend le parti des opposants et le dialogue est suspendu au bout d'une semaine, faute d'accord sur la démocratisation du régime et sur le retour à l'ordre.

- Le lundi 28 mai 2018, ils se mettent néanmoins d'accord pour reprendre les pourparlers. Amnesty International dénonce un recours à des groupes paramilitaires pour réprimer les manifestants.

Les évêques font des messe de rue pour le départ du couple présidentiel Ortega-Murillo

- Le mercredi 30 mai 2018, Carlos Pellas, le chef d'entreprise le plus riche du Nicaragua, prend publiquement position pour une élection présidentielle anticipée.

Le Président Ortega répond aux milieux d'affaires en affirmant qu'il restera au pouvoir.

Après la mort de 16 manifestants, notamment à Managua et Masaya, les évêques suspendent de nouveau les négociations.

- Le lundi 4 juin 2018, Rosario Murillo, vice-présidente, lance à nouveau un appel au dialogue. Le lendemain, l'Organisation des Etats américains (OEA) condamne la violence, sans tenir le régime pour responsable de la répression. 

- Le jeudi 7 juin 2018, la conférence épiscopale présente un plan de démocratisation avec une présidentielle anticipée et des réformes constitutionnelles, exigences-clés des manifestants.

- Le lundi 11 juin 2018, les forces de sécurité tentent de démanteler les barricades qui se sont multipliées dans le pays. Regain de violences.

Le jeudi 14 juin 2018, le pays est paralysé par une grève générale, lors d'une journée encore marquée par des violences meurtrières. Le lendemain, gouvernement et opposition trouvent tout de même un accord pour autoriser des observateurs des droits de l'Homme à venir enquêter sur les violences. L'opposition accepte un plan pour lever les blocages.

- Le lundi 18 juin 2018, nouvelle suspension du dialogue.

- Le jeudi 21 juin 2018, Nikki Haley,l'ambassadeur des Etats-Unis auprès de l'ONU déclare que le gouvernement nicaraguayen doit «mettre un terme immédiatement à sa campagne de violence et d'intimidation contre son propre peuple». De plus, les Etats-Unis demandent au gouvernement d'organiser des élections anticipées en mars 2019, au lieu de celles initialement prévues fin 2021.

- Le vendredi 22 juin 2018, La Commission Inter-américaine des Droits de l'Homme (CIDH) présente un rapport de 80 pages au Conseil permanent de l'Organisation de États Américains (OEA) à Washington (État-Unis) au cours d'une réunion extraordinaire. Ce rapport pointe la responsabilité exclusive du gouvernement dans les violences perpétrées depuis deux mois et précise "L'action répressive de l'État a fait au moins 212 morts et 1337 blessés jusqu'au 19 juin."

Le Ministre des Affaires étrangères du Nicaragua, Denis Moncada, présent à cette session extraordinaire qualifie ce rapport de "subjectif, biaisé, plein de préjugés et notoirement partial".  En outre, le ministre souligne que ce rapport de la CIDH ne fait aucune allusion aux méfaits de groupes qui n'ont aucun rapport avec les revendications sociales. Ce rapport ignore totalement "les destructions et les incendies des institutions publiques, des bâtiments municipaux, des unités de police, des installation du Front de Libération Sandiniste [FLSN, le parti au pouvoir] et des logements de dirigeants et de fonctionnaires en plus de la destruction  et du pillages d'ambulances, de centres de santé, de cliniques mobiles, de maternités, d'écoles, d'équipements de municipalités."

- Le samedi 23 juin 2018, regain de la répression notamment autour de l'Université nationale autonome du Nicaragua (UNAN) où sont retranchés des dizaines d'étudiants.

- Le mardi 26 juin 2018, le cardinal Leopoldo Brenes est convoqué par le Vatican pour rendre compte de la situation au Nicaragua.

- Le jeudi 28 juin 2018, le cardinal Leopoldo Brenes, accompagné de de Mgr Rolando Alvarez Lagos sont reçu en audience privée par le Pape pour lui exposer "au nom de tous les évêques du pays, «la situation douloureuse» que vit actuellement le Nicaragua, ainsi que l’état du dialogue national, dont l’Eglise s’est portée «garante  et témoin», à la demande des autorités. " (https://www.vaticannews.va/fr/eglise/news/2018-06/nicaragua-visite-vatican-archeveque-managua-audience-pape.html)

- Le samedi 30 juin 2018, des milliers de Nicaraguayens défilent pour réclamer la démission du président.

- Le samedi 7 juillet 2018, Daniel Ortega exclut d'avancer les élections présidentielles, et qualifie les opposants de "putschistes".

- Le lundi 9 juillet 2018, des forces pro-Ortega agressent des prélats catholiques (l'archevêque Leopoldo Brenes accompagé du nonce apostolique, Stanislas Sommertag) dans une basilique à Diriamba (sud-ouest).

- Le jeudi 12 juillet 2018, nouvelle manifestation pour réclamer le départ du président.

- Le vendredi 13 juillet 2018, nouvelle grève générale qui tente de paralyser le pays. Les jours suivants, la communauté internationale réclame avec insistance l'arrêt de la répression.

- Le mardi 17 juillet 2018,  des forces anti-émeutes et paramilitaires parviennent à démanteler toutes les barricades (environ 200) et lancent l'assaut (rebaptisé par l'opposition "opération nettoyage"), contre Masaya, la ville la plus rebelle du pays : au moins deux morts. L'un des représentants de l'opposition, le leader paysan Medardo Mairena, est accusé de terrorisme et tentative de saper l'ordre constitutionnel du pays. 

- Le mercredi 18 juillet 2018, au terme de violents affrontements, les forces pro-gouvernementales prennent le contrôle de Monimbo, le quartier rebelle de Massaya. 

- Le jeudi 19 juillet 2018, pendant la commémoration du 39° anniversaire de la Révolution sandiniste de 1979 qui a renversé la dictature d'Anastasio Somozades dizaines de milliers de partisans écoutent le discours de Président Daniel Ortega égraine les noms de près d'une centaine de policiers ou militants sandinistes tués au cours des trois derniers mois. Il déclare ensuite : "Cela m'a fait mal que mes évêques se soient comportés comme des putchistes, [...] ils se sont disqualifiés comme médiateurs, comme témoins, parce que leur message était de faire un coup  d'État".  Ensuite, Rosario Murillo, fustige les opposants et les qualifiants de "terroristes" et de "démons sataniques". 

 

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